L’enseignement anatomique de l’École de Montpellier au Moyen Age débute avec Ricard Senior (Richard Anglicus) dont son Micrologus, comprend une partie réservée à l’anatomie ainsi que Petrus Hispanus qui édite une Anathomia et un traité : « Quaedam de partibus corporis humani, de coitu, de honesta et mala muliere
C’est dans cet esprit qu’Henri de Mondeville (1260-1320) fit à Montpellier la première dissection en France vraisemblablement non autorisée en 1315 s’inspirant du canon d’Avicenne et du techne de Galien. Il apprit l’anatomie à Montpellier sous l’autorité de Guillaume de Salicet et l’enseigna avant de monter à Paris où il était médecin de Philippe IV Le Bel (1268-1314) et de Louis le Hutin ( 1289-1316 ). Bien qu’ayant exercé la chirurgie à Montpellier, il a publié à Paris les parties principales du corps humain en treize planches dessinées d’après nature et classe les tissus et les organes en tissus blancs (nerfs, tendons, ligaments, aponévroses) et en chairs (muscles, glandes, ganglions).
Les dissections à Montpellier ont commencé officiellement en 1340, année qui vit l’Université de médecine se doter d’importants statuts nouveaux à l’article XIII, « De anatomîa quia expenenca optima rerum magistra dicitur, statuimus quod, de biennio in biennium ad lorgins, Cancellanus, una cam Magîstro non legente, sacramento sint astincti ut provedeant quod fiât anathomîa corporalis » Une anatomie était déjà prévue, tous les deux ans, en 1340, mais sans doute, l’Université
n’avait-elle pas l’autorité voulue pour convaincre ceux qui pourraient lui délivrer des cadavres ?
Le personnel de l’École était constitué par tous les médecins de la ville, regroupés en une sorte de syndicat médical en vue de l’enseignement professionnel. Chacun de ses membres, à tour de rôle, ou suivant ses goûts, faisait les démonstrations anatomiques. Dès 1340. Guy de Chauliac (1300-1368) sût les utiliser brillamment dans son enseignement « c ‘est une gageure de vouloir soigner le corps, si on ne connaît pas la structure des organes, leurs rapports, et leur topographie ». En (1363) il écrivait : » tout artisan est tenu de cognoistre le subjet sur lequel il travaille, autrement il erre en ouvrant et tels sont les mauvais cuisiniers ni ne tranchent selon les jointures, mas herisent cassent et déchirent ».
Les difficultés d’obtention des cadavres obligea le Duc d’Anjou, gouverneur du Languedoc, par mandement du 10 octobre 1376, les officiers de justice du Languedoc de fournir chaque année le cadavre d’un supplicié à l’Université de médecine, conformément à l’article des statuts de 1340. Par une lettre Charles II Le Mauvais (1332-1837), Roi de Navarre confirmait à l’école de médecine le privilège d’obtenir annuellement des officiers royaux de Montpellier le cadavre d’un supplicié (Pampelune 11 juin 1377). « Soyent tenu délivré aux dite mestres et autres estudiants tous les ans une fois seulement un condamné à mort de quelques sexes ou soy qui soit, noyé ou pendu ou autrement mis à mort par jugement précédant pour en faire anatomie à la simple réquisition du Chancelier du dite estude dans une réquisition par le sieur Chancelier procureur et syndic de l’université faite l’an 1401 et le 22 d’octobre au baile de leur bailler le pendu au gibet de coldetin comme c’est la coutume que le baile leur doit bailler un malfaiteur condamné à mort pour faire anatomie ». Les Rois de France : Charles VI (1368-1422) au mois de mai 1396, Charles VII (1403-1461) le 12 mars 1436 et Charles VIII (1470-1498) en janvier 1484, et en mai 1496, confirment le mandement de Louis d’Anjou.
L’école de médecine prononce des réquisitions pour avoir le corps d’un pendu, les 22 octobre 1401 et 10 janvier 1456. Les dissections étaient désormais de rigueur à Montpellier, tout au moins de temps en temps, car il fallait trouver un supplicié et aussi que ce soit en période hivernale. Il n’était pas possible, en effet, de conserver les cadavres. Ceux-ci, en général, étaient autopsiés en un seul temps. Montpellier devança dans ce domaine l’Université de Paris qui n’aura semblable privilège qu’en 1498.
En 1498, un édit de Louis XII (1462-1515) porta un coup fatal à cette organisation, en créant quatre places de professeurs, spécialement chargés de l’enseignement, avec la collaboration, il est vrai, du corps des docteurs, qui, à ce titre, continuaient à jouir de certains privilèges et prérogatives. Peu à peu, les professeurs retinrent tous les bénéfices pour eux ; aussi, vers le milieu du XVIe siècle, les docteurs se sont retirés de l’enseignement et l’École est réduite aux seuls professeurs royaux. Les quatre premiers professeurs furent directement nommés par le Roi ; l’Évêque de Maguelone était chargé de pourvoir aux vacances qui viendraient à se produire ; les places, d’après l’édit de 1498, devaient être mises au concours. Ces premiers titulaires n’eurent point d’affectation spéciale ; ils étaient chargés d’enseigner la médecine : chacun s’adonna plus spécialement aux études qui lui plaisaient davantage.